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25 novembre 2012

Catherine Ségurane. Oui, notre héroïne a existé

catherine_segurane1

C'est le 15 août, jour de l'Assomption, qu'eu lieu le célèbre fait d'arme de Catherine Segurane pendant le siège de Nice en 1543. Evidement c'est un porte-étendard turc qui a pris le coup de battoir, mais il valait aussi pour ses alliés francais qui commandaient l'expédition contre Nice, alors certains préfèrent oublier la participation de l'agression francaise... Le 25 Novembre, jour de la Sainte-Catherine, est traditionnellement, le jour où l'on célèbre Catherine Ségurane.

Mais le symbole de Catherine Ségurane est, parfois, quelque peu éprouvé : entre un petit grouspuscule qui détournent son symbole pour véhiculer des idées racistes, xénophobes et non-niçoises (en se cachant derrière Catherine en particulier et l’identité niçoise en générale), entre la légende où Segurane aurai montrée les "parties charnues" de son corps pour faire fuir l'assaillant plutôt que de se battre. Et pour finir la mairie qui commence par se prendre les pieds dans le drapeau du Prophète, avant de nier l'exisence même de Catherine Segurane !

 Dans un fascicule de présentation de Catherine Ségurane, la mairie présente une version mi-figue mi-raisin : “un chroniqueur qui a vécu le siège, Jean Badat, n’évoque pas l’intervention de Catherine” et s’empresse de conclure : “Le personnage qui peut avoir existé mais dont l’existence n’est pas prouvée, n’apparaît que bien après et revêt très vite les caractères du mythe.”

Voici le point de vue d'Alain Roullier, historien et auteur de nombreux ouvrages sur Nice, au sujet de l'existence ou non de Catherine Segurane : « Les Français, par l’intermédiaire de leurs valets déguisés en Niçois, ont tout intérêt à nier l’existence d’un personnage qui représente la résistance à l’agression française. Aujourd’hui, ils l’évacuent en douceur en le faisant glisser dans le mythe ; c’est une malfaisance de plus, ils n’en sont pas à une près.

catherine_segurane_2D’ailleurs ils font une grossière erreur, car un mythe est toujours beaucoup plus dangereux que la réalité. Il existe une trop abondante littérature, une trop riche iconographie et surtout une trop forte empreinte dans l’inconscient collectif niçois, pour que cette héroïne niçoise n’ait pas réellement existé, d’ailleurs, il n’y a jamais de fumée sans feu. La plupart des grands mythes historiques sont devenus un jour réalité : on a retrouvé les ruines de Troie et le trésor du roi Priam, celui du roi de Mycènes, le tombeau empli d’or de Philippe de Macédoine, celui de Toutankhamon ; en Palestine, les archéologues ont retrouvé des villes disparues et des sites dont parlait la Bible ; on pourrait citer une page de personnages, de faits ou lieux mythiques dont l’existence a été prouvée. Quand on cherche, on trouve. Quand on veut surtout ne pas trouver, on ne cherche pas. Le sujet demanderait des développements, mais je simplifierai. Ce qui est historiquement prouvé c’est que les Niçois ont brusquement repoussé l’assaut turc le 15 août 1543 et qu’ils ont pris une enseigne à l’ennemi, ce qui a entraîné leur déroute momentanée. Pourquoi Badat n’a-t-il pas parlé de Catherine, et pourquoi le nom de Ségurane qui est un dérivé de faucher, hacher, couper, ce qui colle trop parfaitement au personnage pour être vrai ? A mon sens, la question amène la réponse.

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Ceux qui butent sur le nom de Ségurane ont une vision d’aujourd’hui où tout est précis et catalogué ; ce ne sont pas de vrais historiens, car un historien doit impérativement décoder son mode de vie et de pensée pour le remplacer par celui de l’époque qu’il étudie. Comment voulez-vous expliquer les actes de Charlemagne si vous lui prêtez vos pensées ? Au XVIe siècle, à Nice, les noms n’étaient pas encore fixés, on les orthographiait différemment, on les confondait avec les surnoms sauf évidemment pour la bourgeoisie, les gens connus, les patriciens inscrits à l’Armorial (et encore, puisque j’ai vu le nom de certains lointains ancêtres maternels orthographiés faussement dans certains actes). Or, Catherine était une fille du peuple, sans doute de très basse condition, et il est probable que personne ne connaissait ou ne se rappelait son nom, des années, bien des années après son exploit. Il faut savoir qu’en cas d’attaque de Nice, tous les Niçois montaient aux remparts pour seconder les troupes régulières. Chaque corporation : tonneliers, chaudronniers, pêcheurs etc., défendait un bastion ou une portion de remparts.

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Des femmes allaient et venaient, apportaient des boulets, de la poix, des pierres ou des vivres. Que s’est-il passé le fameux 15 août ? Une solide et jeune bugadière, battoir pendu à la ceinture, aidait à la défense et courait d’un poste à l’autre ; à un moment, elle se trouve sur le bastion Sincaïre, très ébranlé par les canons ennemis à un moment où les soldats faiblissent et lâchent pied. Elle voit apparaître la tête d’un assaillant et une enseigne au ras d’un créneau détruit ; tout simplement, elle fait ce que nous aurions fait ; comme elle n’a pas d’armes, elle se saisit de son battoir et frappe de toutes ses forces ; elle voit l’enseigne pencher, la saisit et la brandit à bout de bras ; l’ennemi se débande. De multiples actes héroïques ont dû se produire durant ces combats et celui de Catherine n’est que l’un d’eux, à la différence près qu’elle a arraché une enseigne ennemie. Mais la bataille continue et la ville basse tombe le 22 août ; les Français pillent et ravagent, les Turcs brûlent le couvent de la Sainte-Croix, violent les religieuses, montent dans les vallées et ramènent un millier de prisonniers pour les vendre comme esclaves (ils seront heureusement délivrés en mer par Doria) ; on a d’autres soucis que fêter Catherine qui disparaît dans l’anonymat d’où elle vient, peut-être même tuée.

 

catherine_segurane3 Si un militaire avait pris un drapeau, l’affaire eût été autre. Néanmoins, le fait en lui-même, plus que le nom de l’héroïne, a marqué et demeure dans les mémoires. Quand un demi-siècle plus tard, la Maison de Savoie et Nice éprouvent le besoin de magnifier leur histoire, l’acte héroïque est évoqué tout naturellement. Mais voilà, qui est l’héroïne ? On se souvient qu’il s’agissait d’une solide bugadière, qu’elle n’était pas très belle, mais quant à son nom… Pour l’honorer, il faut pourtant lui en trouver un. Elle était forte, elle maniait le battoir comme une faux… Pourquoi pas Ségurane ? Son prénom ? Elle n’était pas mariée à l’âge où on l’était d’ordinaire, elle avait donc fêté les Catherinettes à 25 ans, voilà pour Catherine... Le secret de cette histoire n’est pas accessible aux catalogueurs professionnels, car il ne faut considérer que l’acte qui est véridique, pas le nom , qui d’ailleurs pouvait bien être “Maufacha”.

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Catherine Ségurane n’a peut-être jamais existé sous cette appellation, mais la bugadière qui a prit une enseigne à l’ennemi, oui. Qu’on l’honore sous le nom de Ségurane ou sous un autre, cela n’a aucune importance. On honore bien le soldat inconnu qui avait un nom que l’on a effacé volontairement ; Lénine s’appelait Oulianov, Staline (Homme de fer) se nommait Djougatchvili, Trotski s’appelait Bronstein ; le nom de la dynastie iranienne des Phalavi est un nom d’emprunt adopté par le fondateur, Kémal est appelé Atatürk, les Windsors anglais sont en fait des Hanovre-Saxe-Cobourg-Gotha, le nom de Romanov, éteint, fut repris par les Holstein-Gottorp, les Grimaldi sont des Gouvion-Matignon-Polignac. La liste est longue, sans compter les artistes et hommes célèbres que l’on connaît sous des noms d’emprunt : Montesquieu s’appelait Charles de Secondat et Montalembert, Charles Forbes ; sans compter les souverains et les papes qui changent de nom quand ils accèdent au pouvoir. Dans cinq siècles, des chercheurs qui butteront sur ces noms d’emprunt risquent d’annoncer que toutes ces personnes étaient des mythes… Honorons donc Catherine Ségurane, sans état d’âme, elle n’est pas un mythe. »

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Commentaires
F
c'est un bon documentaire remplie de courage et dignité
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